Pour notre édito, nous avons choisi de relayer, très partiellement, l’émission de la RTBF « Dans quel monde on vit » du 6/01/2024.

Patrick Boucheron, historien et professeur au Collège de France, signe avec « Le temps qui reste », un texte bref, dense et clair sur nos futurs enjeux sociétaux. En historien du temps, il nous enjoint de considérer l’avenir sans céder au pessimisme ambiant car « le temps est grand » et peut aussi se dédier à la création, à l’amour et au rêve.

« Il y a quelque chose qui doit nous engager aujourd’hui, c’est de retrouver, restaurer une certaine qualité de colère.

Toute la question, quand on est historien comme moi, c’est de tenter de retrouver dans le passé des raisons de ne plus subir, des raisons de se souvenir qu’on est capable de plus et de mieux que ce que l’on croit d’ordinaire ; mais il faut alors que l’Histoire ne soit pas uniquement l’école des fatalités mais celle des possibilités, des potentialités du temps.

Pour ne pas manquer au temps qui reste, il faut s’abandonner, un peu, au reste du temps : rêver, créer, aimer et ne pas s’abandonner aux passions tristes.

Il est grand temps – et le temps est grand – d’agir ensemble.

Plein de choses m’empêchent d’être catastrophé.

La première, c’est de savoir que les prophètes de malheur ne cherchent pas à avoir raison dans l’avenir mais plutôt à prendre le pouvoir aujourd’hui ».

Ses souhaits pour 2024 : « Je lui dirai « bonne chance » avec la certitude que le plus imprévisible serait que ce qui est prévu arrive.  En tant qu’historien, je pense que ce n’est pas en ayant le nez collé sur l’aujourd’hui qu’on se donne les meilleures chances de voir venir.  Des choses qu’on croyait avoir oubliées et qui reviennent ou auxquelles on a négligé de prêter attention. Comme la guerre d’Ukraine qui a commencé il y a deux ans, pour nous qui avions oublié qu’en réalité elle avait débuté en 2014 avec l’agression russe de la Crimée.

On est en train de devenir des gens qui s’oublient eux-mêmes car en Belgique comme en France, on n’est pas aussi racistes et aussi cons qu’on se l’entend dire sur les plateaux de TV par exemple. Sous la loupe médiatique s’est créé un monstre qui ne nous ressemble pas, on ne vit pas comme ça. Dans la réalité vécue des gens, on n’est pas sur un plateau de CNEWS ! Les meilleurs remparts se trouvent dans tout ce qui nous permet d’avoir une vision large de la société : les sciences sociales, l’histoire, l’économie mais aussi la création et la culture. » Voilà qui, à la lumière du passé, nous donne des raisons d’espérer pour l’avenir !

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